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Y aura-t-il du travail dans le futur?

Le futur est directement lié à la technologie : les androïdes occuperont chaque fois plus de positions dans un marché du travail qui demandera plus de connaissances d’informatique, robotique et données. En Argentine la transition sera dure et l’intervention de l’État indispensable.

Aujourd’hui tout le monde parle du futur du travail. Le sujet cause un impact profond : on craint de voir de nombreux travailleurs perdre leur emploi suite à l’avancée incessante de l’automatisation des tâches, la robotique et l’IA (intelligence artificielle).

Cette crainte est-elle fondée ? Certainement oui. Cependant, il y a également de nombreuses raisons de croire que la 4e Révolution Industrielle peut apporter non seulement une infinité de nouvelles tâches et postes de travail, mais aussi une vie plus confortable et même égalitaire pour tous, permettant de mieux accéder aux biens et services ainsi qu’à des emplois de meilleure qualité.

Il est vrai que de nombreuses tâches répétitives et d’autres qui exigent de la force physique ou qui sont dangereuses sont en
voie de disparition : l’Université d’Oxford a réalisé une étude qui a conclu que le 47 % des emplois actuels disparaîtra et programmé un algorithme établissant une liste des possibilités de disparition du plus haut au plus bas. À la tête se trouvent les télévendeurs suivis par les vendeurs d’assurances, agents de douane, employés bancaires, arbitres de sports, vendeurs dans des boutiques et agents de voyage, entre autres.

Au Japon, pays renommé pour son développement en IA, des robots de tout type abondent. Pas seulement à cause du progrès technologique du pays mais aussi parce que ses habitants ont une acceptation particulière de vivre avec : ce n’est pas tellement par mentalité moderne que par l’effet du shintoïsme (une forme singulière de l’animisme) pour lequel les personnes vivent entourées d’esprits. Dans les foyers il y a des autels avec des figures pour communiquer avec les ancêtres et dans les temples anciens on voit des sculptures qui enferment des âmes. Les japonais croient que les objets ont une âme. Dans les maisons de retraite se trouvent des petits chiens robots comme compagnons et l’on soigne les enfants autistes en leur approchant ces humanoïdes. Il existe aussi des robots qui réalisent le check-in dans des hôtels, ainsi qu’à la porte d’une banque, le robot Pepper reçoit les clients et les renseigne –en 19 langues– sur la valeur du yen par rapport aux autres monnaies.

C’est certain que ces androïdes seront chaque fois plus nombreux dans le monde du travail, même en occident, bien que sans que leur soit attribuée une âme.
 

Tout change

En janvier 2018, Amazon a ouvert une boutique à Seattle, USA, sans caissiers. La seule condition pour acheter est de télécharger une application : les caméras prennent note des produits dans les charriots et les ajoutent à une facture virtuelle. Cette nouveauté est un défi pour les 3,5 billions d’américains du nord qui travaillent comme caissiers et ça va le devenir bientôt aussi pour leurs pairs argentins. Le futurologue Thomas Frey, fondateur de l’Institut Da Vinci, affirme qu’il y aura une destruction créative de l’emploi, mais que nous ne devons pas oublier que la technologie nous a offert des capacités surhumaines et a permis de réaliser nos rêves les plus fous, comme de nous connecter immédiatement avec des parents ou amis, d’accéder aux divertissements au moment qui nous convient le plus ou encore d’avoir la réponse immédiate à toute question. Il a aussi fait une liste de 162 nouveaux emplois qui vont être créés à travers des entreprises innovantes. Pour en mentionner quelques unes : les PRTS (systèmes de transport personnel rapide) dans la mesure où nos systèmes de transport deviendront obsolètes et que nous aurons besoin d’ingénieurs de circulation, analystes du flux de transport et équipements de construction pour une énorme nouvelle infrastructure. Les collecteurs d’eau atmosphérique : les locataires des lieux de collecte d’eau, moniteurs de purification, conseillers d’impact environnemental. L’économie collaborative va créer de nouveaux modèles d’affaires : auditeurs (personnes qui analysent des foyers et des locaux commerciaux pour partager des actifs), détecteurs d’opportunités, consultants d’impact. L’industrie des drones : ingénieurs d’automatisation et conception de stations. L’impression 3D : experts en matériaux, chefs d’impression de nourriture 3D. Internet des choses (IoT) : il y aura 75 billions d’appareils connectés à internet et chacun des 8 billions d’habitants de la planète aura presque 10 dispositifs ; conseillers en efficience ; architectes de réalité augmentée. Il y aura des millions de capteurs pour lesquels seront nécessaires des inventeurs, designers et organisateurs de flux de données. Crypto-monnaies ou systèmes financiers alternatifs : banquiers, avocats et régulateurs, stratèges pour prêts, gestionnaires de la vie privée. Big Data : l’information devra être ordonnée, analysée et protégée ; gestionnaires de déchets de données et spécialistes en stockage. En ce qui me concerne, je pense que les déserts seront irrigués, qu’il y aura beaucoup de travail pour les ingénieurs agronomes, l’explosion démographique demandera des architectes urbains, il y aura plus de temps libre et les personal trainers et guides de tourisme seront recherchés ; la personnalisation de la consommation demandera des gestionnaires de données dans chaque commerce, chaque boutique réelle, etc. Les personnes vivront beaucoup plus : selon l’OMS, en 2015 le 65 % de la population vivra plus de 65 ans ; on aura besoin d’assistants et thérapeutes pour le troisième âge. N’oublions pas qu’il y a des machines qui prédisent le cancer et les attaques cardiaques. Grâce au développement de la
nanotechnologie, des minuscules robots qui naviguent dans notre torrent sanguin nettoieront nos artères sans besoin d’intervention chirurgicale. Il faudra se lier d’amitié avec les robots et l’IA en général, former des équipes avec eux. Comme Kasparov, qui, après avoir été vaincu par Deep Blue –l’ordinateur d’IBM– a inventé un nouveau jeu qui consistait à former deux équipes pour s’affronter – chacune appelée Centaure et formée par une personne et un ordinateur ; ce n’était plus le meilleur joueur qui gagnait ou le meilleur software, mais la meilleure équipe.

Nous devons nous transformer en êtres hybrides, apprendre comment fonctionne une informatique complexe et comment
manoeuvrer un robot, étudier de manière interdisciplinaire et ne jamais cesser de nous former et de nous actualiser. Le progrès technologique permettra à un médecin de disposer de plus de temps pour écouter et contenir ses patients, mais il devra savoir aussi lire un diagnostique émis par l’IA et comprendre la robotique. Heureusement, aucune IA ne pourra, encore pour longtemps, penser d’une manière critique, faire des déductions non évidentes, comprendre un texte culturel, avoir du bon sens et une vraie empathie.


Panorama au niveau local

En regardant le contexte argentin, qu’a produit la dénommée « Économie de la connaissance » ? Elle se compose d’activités
caractérisées par l’utilisation intensive de la technologie et impacte transversalement toutes les autres, comme moteur de sa transformation numérique et l’entrée dans l’économie 4.0. Au cours de 2018, cette industrie a créé 10.000 postes de travail et a été la troisième exportatrice du pays avec quelques $ 6.300 billions annuels, triplant presque le secteur bovin et du cuir.

La transition sera dure : de nombreuses personnes devront faire une reconversion pour accéder à de nouveaux emplois et pour plusieurs ce sera difficile ou pratiquement impossible. Il sera indispensable pour l’État d’intervenir avec force avant que ne se produise une destruction massive de l’emploi, en créant des réseaux de contention et en articulant des actions avec le monde privé pour former de nouvelles compétences. Un exemple dans ce sens, est la loi récemment approuvée pour la promotion de l’économie de la connaissance. On attend que l’industrie, qui aujourd’hui emploie dans notre pays 215.000 personnes, triple ce chiffre en 2030.

Le futur est directement lié à la technologie et le marché du travail demande des connaissances plus importantes d’informatique, robotique et aussi science des données. Le défi pour l’État, le monde privé et le secteur de l’éducation est d’essayer que toutes les personnes –dans l’ère du numérique– puissent être inclues. Ce triangle « doré » doit aider à réduire les écarts du numérique, avec une technologie plus inclusive et à la portée de tous et surtout à donner la formation qui permettra l’accès au travail du futur.

 

Photo : courtoisie Virtuality

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